Tahiti - jour 1
Je cherche le sens.
Le sens d’avoir fait ce trajet, le sens de passer 3 semaines ici, le sens d’avoir dit oui. J’ai cru que je trouverai dans l’apaisement d’avoir pris une décision, mais ça n’a pas été le cas. J’ai cru que je le trouverai une fois ici, mais ça n’est pas le cas. J’ai cru que je le trouverai dans le fait de faire plaisir à ma petite soeur en y allant, mais ça n’est pas le cas.
Ma psy m’a dit “Je pense que tu peux juste y aller et te laisser surprendre”. C’est la seule chose qui a permis de faire sens jusqu’à présent. Mais quand rien ne fait sens, trouver la légèreté de la surprise, ça n’est pas facile.
Embarquement immédiat pour …Tahiti
J’essaie de trouver des bribes de sens, et une d’entre elles est de garder une trace. Alors j’essaie d’écrire, je le fais pour moi, je le publie par principe, et demain est un autre jour. Il y a trop d’enjeux et de difficultés pour que je m’engage sur la durée.
L’avion
Je crois que rien n’aura été plus compliqué que de dealer avec l’impact carbone de ce voyage. Impossible d’étouffer la culpabilité de faire 24h d’avion pour des raisons personnelles alors que ça ne faisait même pas vraiment sens…
Essai de se décaler dès la veille (raté car la grasse matinée n’a pas été de mise, j’ai juste fait 4h du matin -> 9h), tout l’angoisse du trajet de la veille avait disparu (là encore grâce à la séance de psy, youpi).
Je ne comprenais pas pourquoi j’avais peur de prendre l’avion, mais maintenant que j’ai fait le trajet clairement le problème ce n’est pas l’avion, c’était la suite :p
J’aime beaucoup prendre l’avion. Je crois que ça me rappelle mon enfance, la liberté et la toute-puissance d’être au-dessus du monde, les mers de nuages incroyables.
De façon surprenante, toute culpabilité écologique a disparu quand le vol a commencé. Peut-être une résignation intérieure (maintenant que tu es dedans de toute façon, c’est trop tard), mais surtout un schisme entre le plaisir de ressentir tous ces points positifs et… la déconnexion totale à tout mon militantisme une fois dans l’aéroport (clairement, c’est un autre monde, celui de la consommation, du luxe et… du greenwashing, on a bien kiffé le petit spot publicitaire dans l’avion qui parle de l’avion vert de 2050 et de ses petites phrases type “cela sera compliqué mais est-ce une raison d’abandonner ?”) (réponse : oui Jackie ça n’arrivera juste pas retourne faire la sieste tu dépenses trop d’énergie dans le vide).
Embarquement à 18h, arrivée à la gare à 14h, nous arrivions à 5h heure tahitienne, donc 17h heure française (facile pour le calcul), il fallait donc que nous ne dormions pas avant 7h du matin heure française, mais avec l’escale à Los Angeles, cela déplaçait à 10h du mat’…
Donc besoin de tenir de 9h du matin le lever à 10h du mat heure suivante, ça a été étonamment facile malgré le fait que l’avion a di-rect éteint les lumières (!!) ne nous facilitant pas la tâche. Et en mettant de côté l’impression très littérale de “perdre son temps” car demi-heure après demi-heure il faut faire passer le temps (“plus que 7h40” x_x)
Dernière note sur ce sujet : un repas végétarien était proposé à chaque fois, surprenant mais logique pour qu’ils réduisent leur empreinte carbone. (Ah et pour la postérité, j’ai mangé à Charles de Gaulle les plus mauvais sushis de ma vie, bref.)
Tahiti, jour 1
Il faisait 20° à Dinan, 20° à Paris, 20° à Los Angeles et 20° à Tahiti. C’était un peu rigolo de vivre cette continuité, mais clairement la chalaur hu-mide de Tahiti n’était pas la même que celle de chez moi.
L’un des gros enjeux à ce voyage c’est les difficultés que j’ai à vivre avec ma mère, soucis issus de la période adolescente ou je n’ai pas été… suffisamment bien traitée dirons nous. En résumé à la hache, être proche de ma mère est ressenti comme un facteur de risque constant, car les difficultés vécues il y a 15 ans ont été traumatiques, et peuvent se réveiller en une phrase (surtout si elle est dite par la personne à l’origine des traumatismes, vous avez l’idée)
Donc j’ai 5h max de sommeil dans les pattes, ma mère nous récupère (ma soeur, son mec et moi) à l’aéroport et n’a pas assez dormi non plus (elle est arrivée dans le vol 12h avant nous) et est comme une pile électrique et c’est d.u.r. x_x
Tout à Tahiti me semble familier, je pense que c’est dû aussi à mon récent voyage à la Réunion parce que clairement il y a des choses très similaires. En tous les cas, ce non-décalage est assez perturbant… 24h de vol pour arriver à un endroit familier, quel était l’intérêt de faire ce trajet du coup ?
On fait les courses rapidement pour avoir de quoi petit déjeuner et, merci la mondialisation, 90% du contenu du magasin est très familier (les cookies granola, les madeleines, les beignets… tout). On trouve quand même du jus de fruit fait sur l’île d’à coté, well.
Emmenés jusque chez des amis que mes parents avaient à l’époque et qui sont revenus s’installer définitivement en Polynésie, dans une maison avec des similarités avec celle dans laquelle j’habitais à l’époque, je retrouve les toits en tôles, les maisons grandes ouvertes pour que l’air circule, la salle de bain avec l’entrée par l’extérieur. Je crois que ça me fait du bien de retrouver des choses aussi familières, ça me sécurise un peu. En acceptant de venir, j’avais étrangement l’impression de faire un saut dans un immense inconnu mais… ça n’est finalement pas vraiment le cas.
Tenir, il faut tenir sans dormir jusqu’au soir, les heures s’égrainent sans intérêt, je suis coincée entre vouloir trouver de la tranquilité et risquer de m’endormir si j’arrête toute sollicitation, c’est pas fa-cile.
(Je le note pour la postérité, ma petite soeur est très malade le décalage horaire + faituge + chaleur ne doivent pas faire du bien, ça m’occupe de jouer les garde malade)
Cela me fait plaisir de retrouver les plantes, les colliers de fleurs à l’arrivée avec l’odeur si significative des tiare, les bananiers partout, quelques buissons d’hibiscus, les pins, les cocotiers. On voit aussi plein de coqs partout et surtout on les entend, je les avais oubliés, et puis le son de la musique tahitienne à droite et à gauche, tout ça me plait.
Notre logement est enfin libre, on s’y rend après un repas rapide (pates + beurre), la maison est bien, il ne faut pas dormir, on pose les affaires, établissons le programme (c’est dur avec la fatigue et ceux qui répètent 4 fois la même chose, l’incertitude forte sur le temps…) et on décide d’aller à la pointe Vénus, c’est la plage qui était à 10 minutes de là où nous habitions, je m’attends à ma première salve de “souvenirs”.
Grosse arnaque, je ne me souviens de quasiment rien. Le lieu a été un peu réaménagé, je reconnais le phare, mais pour tout le reste c’est dur, il me semble reconnaitre un cocotier et sinon tout est dans les détails, le sable noir sur les pieds et les graines et épines de pin qui se mélangent dans le sable, mais c’est… tout. Raté pour que ça fasse sens. Je fais un tour sur la plage mais à part les murs délimitant les habitations, rien de plus… bon… On se baigne et l’eau n’est pas si chaude, mais si transparente, c’est si simple de s’y baigner. J’espère revenir un jour où l’eau sera chaude. Les gosses jouent au foot à coté, ça me plait d’être proche des personnes qui habitent ici, là aussi je me sens un peu plus connectée.
La soirée se déroule vite, alors que ne pas dormir n’était pas trop dur le soleil disparait en une heure, entre 18h et 19h (comme à La Réunion et je n’en avais aucun souvenir !!), et instantanément nos corps recoivent le signal “c’est l’heure d’aller se coucher” et résister devient infiniment plus complexe. Des petites courses ont été faites (pas par moi), je mange en 4e vitesse et vais dormir. Endormir à 19h30, réveillée à minuit, vite rendormir et réveillée à 6h. Décalage horaire : check.
On verra bien le temps qu’il fera sur le reste de la semaine, il est prévu… pluie, pluie, beaucoup de pluie. Moi, j’ai pris mon ciré :p
Je me note au passage pour m’en souvenir que j’ai réussi à dire à ma mère que les remarques sur la nourriture étaient strictement interdites (“Je suis en train de travailler sur ma relation à la nourriture avec ma psy, et donc il y a interdiction de me faire des remarques sur la nourriture”). Ca sera déjà un stress en moins.
Maintenant, je vais voir si écrire m’a fait du bien, car les “petites moi” (les mini Maïtané à l’intérieur de moi) sont stressées. Je crois que j’ai peur de n’avoir aucun contrôle sur le programme et avec les problèmes de santé que j’ai eu, ça me fait flipper. C’est un peu dur de ne pas avoir la personne qui m’aide à gérer ces points là à proximité. Je vais devoir me débrouiller, on verra bien.
A plus les chats.
PS : Ah si j’oubliais, j’ai adoré le SMS de Sosh m’informant que le Mo coutait 13€ ici… mais quelle blague !!!!!
PS2 : Je les ai pas cités mais en top-tête des trucs qui font plaisir à retrouver : les margouillats
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